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La Lettre n° 87
Éditorial
par Pierre-Cyrille Hautcœur

Éditorial

Nous avons tous vécu durement le choc des attentats effroyables commis le vendredi 13 novembre, dont les victimes comptaient nombre d’étudiants, d’enseignants et de chercheurs, parfois proches de certains d'entre nous. Nous nous sommes retrouvés le lundi suivant dans l’atrium du bâtiment Le France pour une longue et émouvante minute de silence en hommage aux victimes. Celles et ceux qui la connaissaient ont eu une pensée particulière pour Valeria Solesin, doctorante à l’INED qui avait suivi le master SocStat (EHESS – ENS) de 2009 à 2011.

Nous sommes à présent nombreux à l’EHESS à ressentir le besoin d’agir collectivement pour dépasser la sidération des premiers jours. Alors même que les attentats parisiens suscitent encore un flot de commentaires « à chaud », l’engagement d’un établissement d’enseignement supérieur et de recherche en sciences sociales comme le nôtre doit être d’aider à prendre la distance nécessaire pour comprendre dans toute sa complexité la situation qui a rendu de tels crimes possibles. Ce travail, nous le menons déjà et à l'interrogation de notre tutelle à ce sujet j'ai répondu en montrant des exemples de recherches, de colloques, de publications qui prennent à bras le corps les tensions de nos sociétés à l'origine de ces drames et d'autres. Les colloques récents ou prochains sur « la démocratie de la place publique » - dont la place de la République fait désormais partie - (CERCEC, CESPRA, CRH et TEPSIS, 19-20 novembre), sur « radicalisation politique et lutte armée » (CMH, 3 décembre), sur « l'effondrement des sociétés » (TEPSIS, 16-17 décembre), en sont des exemples marquants mais non pas rares. Nous travaillons donc à faire connaître ces travaux plus largement, comme s'y emploient aussi l'IISMM et TEPSIS. Mais nous devons faire plus.

Ensemble nous pouvons, avec nos collègues des autres établissements de PSL et d’ailleurs, organiser un travail intellectuel commun sur les causes et les conséquences de long terme de ces attentats. En conjurant par ce travail collectif les simplifications et les amalgames qui nourrissent les discours de stigmatisation, nous pouvons contribuer utilement non seulement à nourrir le débat public mais aussi à éclairer l’action politique. Les sciences sociales observent et peuvent utilement accompagner ces débats qui traversent en profondeur nos sociétés, comme nous l’avons fait très récemment en invitant des réfugiés et des demandeurs d’asile à dialoguer directement avec l’École et ses publics. À nous d’inventer notre manière d’accueillir la discussion et d’approfondir le débat en développant des perspectives originales et porteuses de sens. C'est notre mission et je compte sur vous tous pour l'assumer collectivement.