L’Afrique représente un objet d’études singulier pour les sociétés européennes et leurs savants, depuis Hérodote. Explorateurs, missionnaires, géographes, anthropologues, archéologues, démographes, historiens, ont parcouru une partie de ce vaste continent, avant même la colonisation européenne, en ont recueilli les musiques, les artefacts, les coutumes, y ont conduit des expériences. Ces savants ont ainsi contribué à y construire une vaste administration et animé des institutions de recherche dont certaines perdurent aujourd’hui. Pour autant la part des financements consacrés aux recherches africaines n’a jamais atteint des niveaux équivalents à ceux consacrés aux autres continents, tandis que la recherche appliquée y fut sans doute plus importante qu’ailleurs. La domination coloniale européenne explique certainement une part de l’activité de connaissance qui s’y est déployée, même sur les territoires qui ont échappé à la conquête. La fin des empires n’a d’ailleurs pas complètement reconfiguré la recherche en sciences sociales.

Quels ont été les outils – manuscrits, voitures-chenilles, caméras, vêtements, stations épidémiologiques – dont les chercheurs et les auteurs de recherches en sciences sociales sur l’Afrique ont disposé dans leur histoire ? présentaient-ils une spécificité « africaniste », et dans ce cas, comment peut-on la caractériser ou l’expliquer ? comment ces outils et leurs fonctionnalités ont voyagé et participé à la création de savoirs nouveaux ? comment, enfin, ces outils ont-ils participé à la reconfiguration des sciences sociales et de leurs savoirs en dehors du continent africain ?