Si l’on s’accorde à penser qu’un certain optimisme, associé à un horizon de progrès et à un humanisme revendiqué, fut longtemps l’un des traits de l’héritage des Lumières, c’est aujourd’hui plutôt un pessimisme, une perte de confiance généralisée dans l’avenir, qui semble régner. Celui-ci a été porté par les interrogations sur le rapport à la nature, à la science, à la technique, sur l’égalité des genres et des races, ou sur la religion. Études environnementales, études de genres, études impériales, ces approches et d’autres ont contraint l’Europe à réévaluer le regard qu’elle porte sur elle-même et à s’interroger sur les fondements de son unité et de son histoire, dont les Lumières ont longtemps, et pour bon nombre, constitué un élément essentiel.

La prétention occidentale au monopole de la modernité, qui s’est fondée sur le grand récit des Lumières, est largement remise en cause. Quelle signification les Lumières peuvent-elles encore avoir dans une nouvelle configuration mondiale des savoirs ? Quel rôle la notion même de « Lumières » a-t-elle joué dans les débats récents invitant les Européens à décentrer leur regard ? Quelle place les Lumières, comme symbole de la culture occidentale ou sous la forme de réappropriations, peuvent-elles jouer aujourd’hui ?